Voilà bien quelques semaines que les playoffs ont débuté et on ne peut pas dire que les deux rookies ralentissent l’allure durant cette postseason. Ben Simmons et Donovan Mitchell continuent de briller chacun à leur manière. Il est maintenant l’heure de faire leur bilan. Alors êtes-vous plutôt Simmons ou Mitchell ? Ou bien peut-être pour un partage équitable ?
Avec ses performances exceptionnelles face au Thunder, Donovan Mitchell a presque déjà mis tout le monde dans sa poche. Ben Simmons lui, a réussi une bien jolie série face au Heat, mais presque immédiatement éclipsé par son opposant. Pour autant et pour partir sur de bonnes bases, il semble important de rappeler une règle importante : les votes pour le rookie de l’année sont déjà clos depuis la fin de la saison régulière. Eh oui, désolé pour les fans incontestés de Mitchell, mais ses prestations ne sont pas et ne doivent pas être prises en compte pour le rookie de l’année. Bien qu’il serait tentant d’en tenir compte, c’est bien uniquement la saison régulière qui est comptabilisée et cela s’applique évidemment pour les autres trophées comme le MVP ou le COY.
Partant de là, faisons le point sur la saison des deux joueurs. Spoiler : les deux ont brillé, mais différemment.
Ben Simmons
Statistiques : 15.8 points (54.5%), 8.2 passes, 8.1 rebonds, 0.9 contre et 1.7 interception par match en 33.7 minutes
Premier choix de la draft en 2016 en provenance de LSU, Ben Simmons était attendu en NBA. Une galère au pied et l’intérieur (à l’époque) a pris une année de retard. Une année qui fait bien débat désormais, mais nous y reviendrons dans quelques paragraphes. Débarqué en NBA avec le surnom de « mini-LeBron », cela doit forcément mettre la pression, sauf peut-être pour Ben Simmons. Le rookie est arrivé avec les Sixers dans l’objectif d’atteindre les playoffs, et c’est une mission aujourd’hui largement accomplie. Quatrième à l’Est, plus de 50 victoires, la saison collective de Simmons est une réussite totale. Bien aidé par Embiid ou des vétérans bien trouvés, l’influence du joueur de 21 ans fut tout de même énorme. Offensivement ET défensivement, ses responsabilités n’ont fait qu’augmenter au fil des mois.
Il suffit d’un seul coup d’œil pour remarquer la montée en puissance du joueur des Sixers et notamment sur son mois de mars incroyable. Une production offensive et défensive en nette hausse. C’est simple sur le mois de mars, Simmons faisait que mieux que James Harden. Au final, il finit la saison avec un offensive rating de 109.4, excellent, mais on notera également son impact défensif trop souvent sous-estimé avec 101.4 en defensive rating, l’un des meilleurs de la ligue. Avec son gabarit si particulier, l’ancien de LSU est un cauchemar pour l’attaque adverse, capable de défendre de multiples positions. Avec Ben Simmons sur le parquet, les Sixers dominent également leur adversaire en moyenne de 8 points. Oui, l’influence du rookie sur le parquet est plus que notable.
Passe, vision, pénétration, défense, Ben Simmons est un joueur encore plus complet que prévu. Attention cependant, complet ne veut pas dire parfait. Le manque évident du joueur reste son shoot, ce qui le différencie de Donovan Mitchell justement. Mais un tir, ça se travaille et espérons pour lui que Simmons le sait. Cependant à l’heure actuelle et avec sa facilité déconcertante à rentrer dans la raquette adverse, cela ne semble pas être un problème dans l’immédiat.
Il n’était pas possible d’évoquer le cas Ben Simmons sans parler de la polémique. Simmons est-il un rookie ? Un vrai ? Chacun aura ses raisons, ses argumentations. Le plus important reste encore les règles. Oui, Ben Simmons est un rookie. C’est en tout cas ce que dit la NBA. Simmons débute sa première saison en NBA, il est donc considéré comme tel. Cela peut parfois donner des exemples surprenants comme Bogdan Bogdanovic, 25 ans mais bel et bien rookie. Ou enfin le cas Andre Ingram. Premiers matchs NBA en fin de saison à 32 ans et donc considéré également comme un rookie.
Voter Mitchell pour le rookie de l’année car Simmons est un « faux rookie » est donc dénué de sens. Les votants, les journalistes, n’ont pas pris cette donnée en considération. Ben Simmons a-t-il eu vraiment une année pour se préparer ? Oui et non. Au cas où il faudrait le rappeler, Simmons était blessé. Pas d’entraînements, pas de voyage, il n’a pas profité de tous les avantages d’un joueur NBA. Il a bien évidemment pu côtoyer les joueurs, les installations, mais certainement pas de tout le luxe. Mais priver un joueur de postuler au titre de rookie à cause d’une blessure serait-il vraiment juste ? On vous laisse y réfléchir.
Alors oui, Ben Simmons a Joel Embiid à ses côtés et cela aide sans aucun doute. Mais tout de même, les Sixers sont venus finir la saison régulière avec 16 victoires de suite et SANS Joel Embiid. Inutile de préciser que Ben Simmons en triple-double sur cette série n’y est pas étranger. Il est d’ailleurs devenu le premier joueur de l’histoire de la NBA à faire cela sur une série dépassant les 10 victoires.
Passons maintenant à l’arrière du Jazz. Vous allez voir, ce n’est pas mal non plus.
Donovan Mitchell
Statistiques : 20.5 points (43.7%), 3.7 passes, 3.7 rebonds et 1.5 interception par match en 33.4 minutes
Si le talent de Ben Simmons était évident, celui de Donovan Mitchell n’a clairement pas sauté aux yeux de tout le monde, même pas à ceux du Jazz. Non pas que le joueur était mal vu, on parle tout de même d’un treizième choix de la draft, mais son niveau de jeu affiché est tout simplement incroyable. Loué pour ses qualités défensives, Mitchell brille surtout offensivement avec une palette déjà bien fournie pour son âge. Trois points, pénétration dans la raquette, des moves qui ont même fait perdre plus d’une fois l’équilibre à Paul George. Voir briller Mitchell était concevable vu le talent du garçon, mais certainement pas à ce point.
Mener son équipe au scoring lors de son année rookie et aller de plus en playoffs, il faut remonter à Carmelo Anthony en 2003 pour voir ça, un sacré bout de temps. Cela situe déjà un joueur. Est-il la seule raison expliquant la présence du Jazz en playoffs ? N’oublions pas non plus l’apport de Rudy Gobert qui a complètement changé le visage de sa franchise à son retour.
De simple rookie censé apporter défensivement, en quelques mois Donovan Mitchell est devenu l’option offensive numéro 1 d’une franchise allant en playoffs.
Hors des playoffs début 2018, ce tableau démontre parfaitement la montée en puissance de Donovan Mitchell et du Jazz. Une production offensive similaire bien que presque parfaite sur le mois d’avril. On notera également la grosse montée en puissance de la défense, s’expliquant également par le retour de Rudy Gobert. Sans ce dernier, l’attaque du Jazz n’a pas non plus été flamboyante. Mitchell cette saison présente un offensive rating de 107.3, pour un defensive rating de 100.9, encore mieux que Ben Simmons. Pourtant, c’est bien en attaque et au scoring que le talent du joueur frappe le plus. Bien aidé par le staff du Jazz, le joueur s’est mis en mode tueur au cours de la saison pour permettre au Jazz de viser bien plus haut.
Comme l’explique un assistant de Quin Snyder, Johnnie Bryant, grand artisan de la montée en puissance de Mitchell, le joueur n’hésite pas à essayer de nouvelles choses et les appliquer en match. Pour un rookie d’autant plus, c’est très rare. Déjà comparé à Dwyane Wade, la comparaison est sans aucun doute flatteuse pour l’arrière.
Pourtant et c’est ce qui peut également coûter au jeune joueur, le début de saison de Donovan Mitchell fut quelque peu laborieux. Sept premiers matchs à 9.3 points de moyenne, 33% au tir, 29 derrière l’arc. Mitchell a dû attendre un bon mois avant de lancer la machine et gagner une place dans le cinq de départ. Au fil des mois, l’arrière est monté en puissance et il est rapidement devenu un casse-tête pour les équipes adverses, rajoutant un nouvel atout à son jeu chaque mois. Son tir derrière l’arc est devenu meilleur, il est devenu également beaucoup plus agressif vers le cercle. C’est simple, Donovan Mitchell a pris la confiance et rien pour l’instant ne semble l’avoir refroidi depuis.
Avec ses capacités défensives et s’il maintient cette confiance offensivement, Mitchell a tout pour devenir un cauchemar dans les années à venir. Avec tous ses records, il paraît évident de dire qu’il est déjà spécial.
Bon et alors c’est qui le rookie de l’année ?
Eh bien au final, on n’est pas bien avancé. Les deux joueurs sont des monstres, mais leur type de jeu radicalement différent rend la décision difficile à prendre. D’un côté Simmons avec un jeu incroyable à voir. Vision, passe, c’est tout simplement la classe. De l’autre, Mitchell et son instinct de tueur. Scoreur et très propre dans ses mouvements. L’histoire est également belle pour le joueur du Jazz. 13ème choix de la draft et certainement pas attendu à ce niveau, mais la première place à la draft de Ben Simmons doit-elle le pénaliser ? Non. Le meneur était attendu et il a su répondre aux attentes, voire peut-être plus.
Si l’on se fie aujourd’hui aux votes des journalistes – certains ayant dévoilé leur vote – Simmons semble être le plus souvent cité. Encore une fois, il est tentant d’inclure les performances de Mitchell en playoffs pour voter, mais ce ne sera pas le cas. Si ses performances sont moins « flashy », Ben Simmons a également réalisé une formidable série pour se défaire du Heat. Le choix sera donc quoiqu’il arrive difficile et ne plaira pas à certaines personnes.
Un co-MVP ? L’histoire serait belle car les deux joueurs méritent sans aucun doute de gagner ce trophée. Mais les votes actuels laissent penser que le joueur des Sixers possède une avance. Ben Simmons a parfaitement fini sa saison en triple-double et une longue série de victoires, il a donc laissé une meilleure impression sur le sprint final.
Au jeu de celui qui a le plus d’impact et de responsabilités, Ben Simmons a-t-il l’avantage ? Bien entouré avec un effectif complet et construit pour le titre, Simmons peut pourtant être vu comme un catalyseur. Il dicte le jeu, donne les informations, son importance dans le jeu des Sixers est cruciale. Sans lui, oui, les Sixers seraient dans la course aux playoffs, mais ils ne seraient clairement pas les mêmes. Du côté de Mitchell, son importance offensivement est évidente. Est-il la seule raison de la présence du Jazz en playoffs ? Non plus. Affirmer cela serait manquer de respect au boulot fourni par Quin Snyder et son staff. Ricky Rubio, Rudy Gobert, Jae Crowder (depuis son arrivée) et Joe Ingles ont par exemple été formidables tout au long de la saison. Offensivement efficace, c’est le boulot défensif qui a impressionné cette saison également à Utah. Comme ils l’ont démontré face au Thunder, le Jazz c’est avant tout une équipe.
Prendre une décision entre Ben Simmons et Donovan Mitchell est clairement compliqué. Par le passé et dans la plupart des cas, Donovan Mitchell aurait certainement remporté ce trophée cette saison, mais Simmons semble tout simplement plus complet (encore une fois, pas parfait). Ben Simmons aurait brillé n’importe où, mais en serait-il de même pour Donovan Mitchell ?
Dans tous les cas, ne faites pas la promotion de l’un pour venir critiquer l’autre. Les deux joueurs ont été fantastiques à voir jouer et renier le talent de l’un ou de l’autre serait criminel. Ben Simmons ou Donovan Mitchell, la ligue est dans tous les cas entre de bonnes mains.