Anthony George Douglas Mason, 2m01, 125 kg, des épaules à faire pâlir Dwight Howard et une patte gauche en or massif. «Mase» n’est pas le genre de joueur que les livres d’histoire retiennent, mais il a marqué des générations entières qui ont grandi avec son esprit de guerrier, sa folie, ses coupes de cheveux et son trashtalking. Comme on dit : «les vrais savent», à l’occasion de son anniversaire (47 ans aujourd’hui), Parlons Basket vous dresse son portrait.
Du sable au bitume
Fils de Mary Mason et d’un père absent, Anthony Mason a vu le jour à Miami le 14 décembre 1966. La plage et le soleil de la Floride ne sont que de courte durée, sa mère décide de partir s’installer dans la Grosse Pomme, dans le Queens à Springfield Gardens. Il n’aura pas fallu beaucoup de temps à Anthony pour s’acclimater à l’asphalte new-yorkais, très vite il se met au basket et au baseball en squattant les playgrounds du coin.
Arrivé en high school, Anthony Mason garde ses deux sports préférés, révélant même avoir un penchant pour le gant et la batte. Mais ce sera finalement la balle orange qui l’emportera. Au lycée de Springfield Gardens, Mason joue l’ailier sixième homme de luxe, sans trop faire de bruit il arrive à décrocher une bourse pour la fac de Tennessee State University.
1984, fini le lycéen filiforme, Anthony Mason reconnu pour ses qualités défensives, se développe physiquement et techniquement et rajoute une palette de moves offensifs. « Mase » aligne 18,7 points et 8,1 rebonds de moyenne en quatre années universitaires. Avec une année senior où il explose ses stats (28 points et 10,4 rebonds en moyenne par match). Le « Fou balèze » devient un joueur complet, doté d’une main gauche dorée, et d’une lecture de jeu comme on en voit peu pour son gabarit. Mais tout cela suffira-t-il pour se faire une place en NBA ?
En juin 1988, les Portland Trail Blazers le draftent au troisième tour à la 53ème position, mais le rêve d’Anthony Mason sera de courte durée, il n’aura même pas l’occasion de faire un match de saison régulière. Coupé lors de la présaison, l’ancien des Tigers doit encore une fois faire ses valises et rebondir ailleurs. Sa nouvelle destination se trouve en Turquie, à l’Efes Pilsen. L’expérience tourne court et à la promenade de santé pour l’américain, avec quelques cartons offensifs (record à 33 points). Il s’ennuie à Istanbul et pour tuer le temps il passe ses jours libres dans les salles de musculation (il atteint les 125 kg à l’été 1989 !), avec l’objectif en tête de retenter sa chance en NBA.
Les New Jersey Nets lui offrent cette chance lors de la saison 1989-1990. Mais ses performances ne satisfont pas les Nets (1,8 pts, 1,6 rbds en moyenne), le rêve d’Anthony Mason n’aura pris forme que 21 matchs. Le 30 octobre 1990, il est coupé. Deux mois plus tard, les Denver Nuggets lui font signer un contrat de 10 jours, «Mase» n’a que trois matchs pour convaincre (3,3 pts de moyenne en 7 min de jeu), cela ne sera pas suffisant pour ses dirigeants.
Retour à la case voyage, Anthony Mason s’exporte au Vénézuela aux Marinos d’Oriente histoire de se refaire, puis rejoint très vite l’anti-chambre de la NBA. Il signe pour le reste de la saison 1990-91 chez les Fast Breakers de Tulsa en CBA et tourne à 29 points de moyenne. Anthony Mason est prêt, les scouts sentent que la bête blessée peut intégrer la grande ligue après une summer league dantesque.
Les Knicks auront le nez fin à l’été 1991, pour s’attacher les services de Monsieur Muscles.
L’histoire devient « hollywoodienne », le new-yorkais d’adoption retourne dans la ville qui l’a vu grandir. Après avoir usé ses sneakers sur tous les playgrounds de « Big Apple », Anthony Mason va revêtir le maillot des New York Knicks du coach Pat Riley, qui résuma bien le parcours de son nouveau poulain :
» Toute la vie est résumée ici. Personne ne voulait de Mase et le voilà au top. Des gars comme lui peuvent réellement parler du chemin à parcourir pour évoluer en NBA. Eux savent se battre pour garder leur place. «
À 25 ans, Anthony Mason ne le sait pas encore mais il va devenir l’un des chouchous du public au Madison Square Garden.
[1991-1996] Heart & Soul of New York City
La grande ligue va faire la connaissance d’un monstre athlétique comme on en voit rarement, la combinaison de la taille, de la puissance et de l’agilité, 2m01 et 125 kg de muscles. Un physique de déménageur inarrêtable pour les ailiers, une vitesse et un handle trop rapide pour les intérieurs adverses. Anthony Mason se révèle être une arme de choix pour son coach et pour déstabiliser les équipes en face.
Le natif de Miami, s’intègre parfaitement dans le jeu new-yorkais avec les Patrick Ewing, Charles Oakley et autres John Starks. Il devient le 6ème homme de luxe de Pat Riley, le guerrier venu du banc toujours prêt pour aller au combat, une qualité qu’il va transmettre à ses coéquipiers. Reconnu pour être un défenseur rude sur l’homme grâce à son physique d’armoire à glace, Mason entretien également son trashtalking légendaire par le biais de ses coiffures (voir en bas de l’article) et de ses punchlines sur le terrain. Le gamin du Queens vient de la rue, la tchatche sur un terrain il a connu cela toute sa jeunesse sur les playgrounds new-yorkais, chaque soir il rentre dans la tête de son adversaire direct.
« Ça fait partie de mon jeu. C’est la méthode de la rue. Quand ton adversaire a manqué plusieurs shoots, c’est le moment de le mettre au plus bas. Je lui dis des trucs comme : « Tu n’es pas près de revoir la balle »ou « Achète-toi des bras, man »… »
Ce qui lui vaudra quelques accrochages, mais Anthony aime faire le show, encore plus lorsqu’il s’agit de l’une des plus belles salles de spectacle au monde.
Les Knicks de Pat Riley sont à l’image de certains de ses joueurs (Mason et Starks en tête) des revanchards, des joueurs à qui la ligue n’a rien donner pour y arriver. Des parcours atypiques qui vont forger la réputation et l’identité des Knicks, défendre dur.
La première saison complète d’Anthony Mason l’emmène jusqu’aux playoffs en 1992 et à la demi-finale de conférence Est (4-3) face aux Bulls de Michael Jordan qui s’envole vers le back-to-back.
En 1992-93, les Knicks récupèrent un joueur à leur image, Doc Rivers en provenance des Clippers de Los Angeles. Les coéquipiers d’Anthony Mason réalisent la meilleure de toute l’histoire des New York Knicks (60 victoires pour 22 défaites), les stats de « Mase » sont en hausse et son équipe arrive à se hisser jusqu’à la finale de conférence Est face… aux Bulls encore une fois. Mais les Knicks échouent de nouveau (4-2).
La saison 1993-1994 marque un changement de rôle pour Anthony Mason, il débute quelques rencontres mais ses stats chutent. L’équipe enregistre l’arrivée de Derek Harper à la mène pour remplacer Doc Rivers blessé. Cette année est la bonne pour les Knicks (Jordan fraichement retraité) ils arrivent enfin aux NBA Finals pour y affronter les Houston Rockets de Hakeem Olajuwon. Mais le pivot nigérian est sur un nuage, il domine la raquette de New York et les Knicks échouent d’un rien si près du titre (4-3).
L’année suivante Anthony Mason décroche enfin son titre tant mérité de sixième de la saison 1994-95. Les hommes de Pat Riley s’arrêteront à la demi-finale de conférence Est, la faute aux Pacers d’Indiana et à ce diable de Reggie Miller qui donnera naissance à l’une des séries (4-3) les plus épiques de l’histoire. Pat Riley démissionnera de son poste à la suite de ces playoffs.
Anthony Mason perd donc le coach qui lui a donné sa chance. Mais l’arrivée successive sur le banc de Don Nelson et de Jeff Van Gundy lors de la saison 1995-1996, lui offre une place dans le cinq majeur. « Mase « devient la deuxième option offensive (14,6 pts) et le deuxième meilleur rebondeur (9,3 rbds) derrière Pat Ewing, et mieux il devient le meilleur passeur de son équipe (4,4 pds) lors de cette saison. Il s’adjuge le record des Knicks du joueur ayant passé le plus de temps sur le terrain (3 457 minutes de jeu). La carrière d’Anthony Mason décolle enfin à 29 ans, mais les résultats des Knicks ne sont toujours pas au rendez-vous. Ils se font balader en playoffs lors de la demi-finale de conférence Est, par la mythique équipe des Bulls de Chicago de 1996.
Le statut d’éternel loser colle à la peau de la franchise de « Big Apple «, le changement s’impose chez les Knicks et c’est Anthony Mason qui va en payer le prix.
[1996-2000] Voler de ses propres ailes
Juillet 1996, débarqué en Caroline du Nord, terre de basket, dans une franchise dont le passé ne remonte qu’à une décennie peut ressembler à une aubaine pour Anthony Mason. Echangé contre Larry Johnson, les Hornets mise sur un nouveau tandem dans la raquette composée d’Anthony Mason qui sort de sa meilleure saison statistique au sein de la ligue, et de Vlade Divac débauché aux Los Angeles Lakers lors de la draft de la même année (contre un jeune lycéen du nom de Kobe Bryant…).
Une paire d’intérieurs-passeurs, menée par le shooteur Glen Rice, et Dave Cowens le nouveau coach qui les conduira jusqu’à la 6ème place de la conférence Est. « Mase » aligne la meilleure saison de sa carrière pour sa première année chez les Hornets (16,2 points, 11,4 rbds, 5,7 pds), il rafle au passage une nomination dans la All NBA Third Team et une seconde dans la NBA All-Defensive Second Team. Mais les Hornets vont caler en playoffs 1997, face… aux Knicks de New York. Mason se fait sweeper par ses anciens partenaires. Lui qui venait de prendre son envol, redescend sur terre très vite.
La saison suivante montre une légère amélioration sur le plan collectif, les Hornets terminent 4ème de la saison régulière, passent sans trop de diffcultés le premier tour face à Atlanta. Anthony Mason retrouve les demi-finales de Conférence, mais sur sa route se dresse les Bulls d’un certain Michael Jordan, en quête de son dernier titre. Charlotte fait l’exploit d’arracher un match au United Center (4-1) mais l’histoire s’arrête ici pour les playoffs 1998.
Lors de la saison du lock-out en 1998-99, Anthony Mason souffre d’une blessure au biceps droit qui l’empechera de prendre part à l’exercice. Saison blanche pour lui, le sort s’acharne sur les Hornets et ce qui devait ressembler à une éclosion pour Anthony Mason tourne en dépression.
En 1999-2000, les stats de Mason sont en baisse, Charlotte arrive à finir la saison à la 4ème place mais au printemps 2000, les Hornets subissent un upset au premier tour (3-1) face aux Sixers d’Allen Iverson. La campagne de trop pour Anthony et la franchise du frelon, « Mase » est prié de faire ses valises et d’aller voir ailleurs. Un retour aux sources serait le bienvenu pour le guerrier du Queens…
[2000-2001] Home sweet home
Été 2000, Charlotte tente un coup sur le marché, fatiguée des éliminations successives en playoffs, la franchise de Caroline du Nord monte un trade qui envoie Anthony Mason, Eddie Jones et Ricky Davis à Miami contre Jamal Mashburn et P.J Brown et quelques troisièmes couteaux. Le «Fou balèze» rentre à la maison, sa ville natale qu’il a quitté 34 ans plus tôt pour le bitume de Manhattan. Il y retrouve son coach aux Knicks, celui qui lui avait fait confiance et lui avait donné sa chance, Pat Riley. Il réalise une de ses meilleures saisons statistiques (16,1 pts, 9,6 rbds, 3,1 pds), ce qui lui vaut (un peu aidé par les blessures de Grant Hill et Alonzo Mourning) une place au All Star Game de Washington en 2001. Match légendaire d’une rare intensité, dans lequel l’Est décroche la victoire (111-110) grâce à une remontée extraordinaire de 21 points.
Qualifié pour les playoffs 2001, l’ironie du sort voudra qu’Anthony Mason croise son ancienne équipe des Charlotte Hornets au premier tour. Le Heat subit un coup de balai (3-0), Mason est en vacances. Free-agent l’été de la même année, le gros bébé de 125 kilos fait ses valises, pour tenter se donner un ultime défi.
[2001-2003] Dernier round
Anthony décide de signer chez le finaliste de conférence 2001, les Milwaukee Bucks pour s’offrir une chance de décrocher enfin une bague. À 35 ans, «Mase» vient apporter son expérience et ses muscles à un groupe jeune et prometteur, composé entre autres de Ray Allen, Glenn Robinson, Sam Cassell, Tim Thomas et le jeune Michael Redd. Une équipe capable d’atteindre comme l’année précédente la finale d’une conférence Est réputée faible et très ouverte à l’époque.
Mais la mayonnaise ne prend pas, les joueurs de Georges Karl terminent la saison 2001-2002 avec un bilan de 41 victoires pour autant de défaites et ne se qualifient même pas pour les playoffs. Mason sort sa pire saison statistique (9,6 pts et 7,9 rbds) depuis 1994, et devient le vilain petit canard du vestiaire des Bucks. Critiqueur critiqué, Anthony lâche ses punchlines contre ses coéquipiers, le staff de Milwaukee s’agace des frasques de son intérieur…
La saison 2002-2003 ne changera rien, malgré le départ de Glenn Robinson et les arrivées de Gary Payton et de Desmond Mason. Les Bucks ne font guère mieux que l’année précédente (42 victoires) et se qualifient de justesse en playoffs. Ils rencontrent dès le premier tour le futur finaliste NBA, les Nets de Jason Kidd et se font éliminer 4-2. Anthony Mason connait une saison encore plus diffcile sur le plan comptable, celle de trop. Il n’a plus la force de se battre, son départ de New York a peu à peu éteint la flamme qui l’animait chaque soir.
À 36 ans, Anthony Mason prend sa retraite alors qu’il lui reste deux ans de contrat, un joueur emblématique des années 90, et des Knicks de Pat Riley s’en va. Les livres de stats ne le retiendront pas, mais il aura marqué la ligue par son physique, son énergie, son parcours, ses coupes de cheveux totalement hors normes.
Aujourd’hui Anthony Mason veille au bon développement de son fils Anthony Mason Jr qui comme son père emprunte des chemins détournés pour atteindre son rêve par tous les moyens, pouvoir jouer en NBA.
« En vérité, le chemin importe peu, la volonté d’arriver suffit à tout ». C’est un peu la phrase qui pourrait résumer la famille Mason.
Les 5 dates clés de la carrière d’Anthony Mason :
1988 : drafté au 3ème tour à la 53ème place par les Portland Trailblazers.
1995 : élu meilleur 6ème homme de la ligue.
1996-97 : bat ses records en carrière de minutes, points, rebonds et passes par match.
31 mars 2000 : Record en carrière – 31 points, 14 rebonds, 11 passes.
11 février 2001 : 1ère sélection au All Star Game – 2 points, 4 rebonds, 1 passe, 1 interception.
Palmarès :
- Finaliste NBA avec les New York Knicks (1994)
- Meilleur 6ème homme (1995)
- Recordman des Knicks, joueur ayant joué le plus de minutes sur une saison 3 457 minutes en 1995-1996.
- All NBA Third Team (1997)
- All Defensive Second Team (1997)
- 1 sélection All Star Game (2001)
- 4 triples-doubles en carrière.
Mix Anthony Mason :
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