Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Champion du monde 1998 à seulement 25 ans, Robert Pirès ne faisait pour autant pas partie des cadres de l’équipe. Et s’il en doutait, l’ancien Messin en a eu la confirmation en constatant que l’un des tauliers de l’effectif avait décidé de ne pas lui adresser la parole durant l’intégralité de la compétition. Mais « Bobby », comme le surnomment affectueusement les Anglais, a fini par avoir sa revanche…
Si son histoire avec l’équipe de France s’est finie en eau-de-boudin, notamment autour des fameuses rumeurs entourant Estelle Denis et Raymond Domenech, Robert Pirès n’en reste pas moins l’un des joueurs phares de l’histoire récente de l’équipe de France. Avec 79 sélections au compteur, le natif de Reims a pris part à certains des moments les plus marquants des tricolores.
Outre ses 14 buts, Pirès est évidemment celui qui a signé ce débordement de légende contre l’Italie en finale de l’Euro 2000, offrant un caviar à David Trézéguet pour le but en or et le trophée. En 1998, en revanche, l’ex joueur d’Arsenal avait une place moindre dans le groupe. En plus de ne pas être titulaire, en dépit de quelques entrées, il a même été snobé par un cadre du vestiaire.
Robert Pirès ignoré par Marcel Desailly pendant le Mondial 1998
À l’époque, les tauliers du vestiaire se nomment plutôt Laurent Blanc, Didier Deschamps et Marcel Desailly. Plus vieux de 5, 6 ou 7 ans, les anciens ont tout connu, et leur autorité naturelle n’est remise en cause par personne. En revanche, leur approche diffère. Là où « DD » le capitaine parle à tout le monde, Desailly, lui, impose une distance avec certains jeunes, dont Robert Pirès.
Dans une interview accordée à L’Équipe il y a quelques temps, l’ailier dévoilait ainsi :
Marcel était très dur, très strict avec les jeunes. Marcel ne me parlait pas en équipe de France, il avait imposé une hiérarchie. C’était le seul pratiquement à qui je ne parlais pas. Alors, au fond de moi, j’étais très fier d’avoir fait ça à Marcel Desailly.
Fier d’avoir fait quoi, nous direz-vous ? Et bien de l’avoir enrhumé lors d’un match de Ligue des Champions entre l’OM et Chelsea en octobre 1999. Toujours aussi remuant, Pirès s’était signalé par un superbe but dont il se souvient encore :
Quand tu jouais Chelsea, si tu échappais à Didier-la-cisaille (Deschamps), qui était sans pitié aussi, tu avais ensuite Marcel Desailly… C’était tendu. Ce que j’aime dans cette action, c’est l’accélération que je mets à Marcel. Je le dépose ! Vraiment ! Après, je me retrouve dans une position où je dois centrer. Et je ne sais pas ce qu’il se passe dans ma tête, je frappe angle fermé. Le ballon tape les deux poteaux, sans toucher le sol et rentre. Énorme réussite.
S’il n’y avait probablement pas de malice dans le comportement de Marcel Desailly, qui utilisait là une approche « à l’ancienne », Robert Pirès n’a pas boudé son plaisir de réussir à le mystifier pour inscrire l’un des buts les plus mémorables de sa carrière. Rassurez-vous toutefois : tout va bien entre les deux hommes, qui partagent avec leurs 20 autres coéquipiers ce statut de héros de tout un peuple pour l’éternité.