Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Acteur phare du cinéma français, Jean Dujardin n’a jamais caché son amour de la France, quitte à se retrouver parfois dans des polémiques vaines ou insipides. Et parce qu’il aime son pays, et qu’il n’a plus rien à prouver en la matière, le quinquagénaire se permet parfois de pointer des failles ou faiblesses qu’il a identifiées. Notamment sur un sujet bien précis.
Lorsqu’il a accédé à la notoriété avec « Un gars, une fille » il y a 25 ans, Jean Dujardin n’aurait pas pu rêver d’une meilleure carrière. Solidement installé comme l’un des acteurs les plus bankables du cinéma français, reconnu par toute la profession (y compris aux Etats-Unis depuis « The Artist »), le natif de Rueil-Malmaison n’a finalement plus grand chose à prouver – ce qui lui permet d’ailleurs d’être sélectif dans ses films.
Mais si Dujardin est autant apprécié des Français, ce n’est pas seulement pour son indéniable talent d’acteur, mais aussi pour sa franchise et, disons-le, un certain côté « franchouillard ». Figurant parmi les rares acteurs à clamer haut et fort l’amour de son pays, Dujardin peut d’autant plus facilement pointer ce qui l’y dérange.
Le regret de Jean Dujardin sur le rire dans la France actuelle
Invité d’Augustin Trapenard au micro de « Brut » lors du Festival de Cannes 2021, l’acteur avait profité de l’évocation de son personnage d’Hubert Bonisseur de la Bath dans OSS 117 pour regretter ce qui, selon lui, s’est perdu en France :
Trapenard : « Le problème avec OSS c’est qu’il est très Français, et qu’il ait cette mauvaise conscience des Français ».
Dujardin : « Oui, mais c’est pas grave hein ! On peut en rire, et il vaut mieux en rire. Je trouve que c’est un peu ce qu’on a perdu. J’enfonce des portes ouvertes, mais on a perdu ça.
Ça fait du bien quand même de tirer la chasse, de se dire que oui, on a une espèce de xénophobie culturelle très forte, qui fait qu’on ne supporte pas vraiment ce qui n’est pas français. On a un peu de mal à le dire. On a un gendre noir dans une famille, on ne sait pas trop comment le dire. On ne sait même pas dire « noir » ou « arabe », alors on dit « black » ou « beur ». On a des petits soucis avec ces trucs-là ».
Ce n’est pas la première fois que l’acteur soulève l’un des problèmes qu’il perçoit dans la société française. Mais malgré les procès d’intention qui lui sont parfois faits, il ne manque jamais une occasion d’assumer son amour pour la France, dans ses qualités et ses défauts, comme il l’avait déjà expliqué :
J’aime bien aimer ce pays et j’aime bien le dire, parce que je pense que c’est le plus gros problème de ce pays : il ne s’aime pas ou pas assez. Parfois je l’ai un peu surjoué, enfin j’ai été un peu chauvin, au moment justement où on imaginait que je ne le serais plus.
Ça fait 50 ans que je vis dans ce pays, ça fait 25 ans que je voyage et que je vois ses régions. Et à chaque fois, je dis : « J’aime la France », soit c’est récupéré par un parti politique, soit tu es suspect, ou alors, il faut avoir un maillot de foot pour le dire en fait… Quand tu dis : « J’aime la France » et que tu as un maillot de foot, il n’y a aucun problème, les drapeaux se dressent. Dès que tu sors du stade, il n’y a plus de drapeau et tu es suspect. Donc, autant bien fermer sa g… Mais j’aime ce pays, et je m’y sens bien ! J’aime bien le dire.
Le message de Jean Dujardin est clair : à une époque où les tensions communautaires sont particulièrement élevées et où les indignations sont fréquentes, il est devenu très difficile, pour ne pas dire impossible, de rire de certains sujets qui font pourtant profondément ce que sont les Français. Un combat que l’acteur est bien déterminé à continuer de mener, comme la saga des OSS en atteste.