Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
La vie de groupe est un exercice très périlleux en équipe de France, et c’était encore plus le cas à une époque où certains leaders n’hésitaient pas à taquiner et bizuter les nouveaux venus. Marcel Desailly le sait, puisqu’il avait ce rôle de « taulier » en bleu, et qu’il a en mémoire deux joueurs qui n’y ont pas survécu…
Si l’équipe de France a dominé le monde entre 1998 et 2000, c’est évidemment grâce à son talent, mais aussi grâce à son approche chirurgicale de chaque grand événement. Derrière les sourires et les boutades, le groupe était composé de véritables « tueurs », prêts à tout pour prendre ou garder leur place, et dont le maître-mot était : compétitivité.
Interrogé par beIN Sports, Marcel Desailly n’avait d’ailleurs pas caché qu’il était le joueur le plus acerbe du groupe avec les nouveaux venus. N’y voyez pas de malice : le « roc », comme il était surnommé, voulait simplement tester le mental des jeunes et s’assurer qu’ils étaient prêts à apporter à l’équipe :
En ce qui concerne les comportements de Deschamps, de Blanc et de moi-même, lorsqu’un jeune était amené à intégrer la sélection, c’était simple : il fallait le tester. On avait besoin de gars capables d’absorber la pression, les comportements. Les Henry, Trézéguet, Vieira… C’est une génération saine, qui a été testée, je peux vous le dire. Didier était un peu plus protecteur, Lolo plus détaché, et j’étais peut-être celui qui piquait un peu.
Marcel Desailly cite deux joueurs qui n’ont pas su s’intégrer en Bleu
Malheureusement, tous les joueurs n’ont pas eu la même capacité à gérer ces tests internes et à surmonter la pression. Desailly en a ainsi nommé deux :
On a perdu pas mal de joueurs, j’avoue la vérité (sic). Certains ont été bousculés, que ce soit par exemple Vikash Dhorasoo ou Corentin Martins.
C’était compliqué pour eux, effectivement, de s’adapter au niveau que l’équipe de France pouvait demander, et à l’exigence de groupe. Il y a des coéquipiers que tu ne connais pas forcément, que tu n’as pas envie de découvrir… C’est tout un tas d’éléments qui font qu’un joueur arrive à s’adapter ou pas au cadre de la sélection.
Dans le cas de Martins, sélectionné une petite vingtaine de fois au milieu des années 1990, c’est surtout l’arrivée de Zinédine Zidane qui lui a été fatale. Dhorasoo, lui, a été sèchement puni pour avoir osé infliger un petit pont à un cadre du vestiaire lors de sa première sélection : rédhibitoire pendant de longues années, jusqu’à la retraite de la vieille garde incarnée par Desailly.
Autre époque, autres moeurs : ce qui serait aujourd’hui considéré comme de l’acharnement voire du harcèlement était un rite de passage pour les jeunes joueurs qui souhaitaient intégrer l’équipe de France. Garant de cette initiation « à la dure », Marcel Desailly ne regrette rien, et surtout pas les joueurs qui n’ont pas su passer le test à ses yeux.