Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Titulaire durant la majeure partie du tournoi, Christian Karembeu a mis sa pierre à l’édifice de la plus belle victoire dans l’histoire du football français : la Coupe du Monde 1998. Avec du recul, le Kanak est revenu sur le terme « black-blanc-beur », tant utilisé pour décrire son équipe, tout en évoquant l’état actuel de la société française. Avec sa franchise habituelle.
Joueur de devoir, pas toujours le plus spectaculaire, Christian Karembeu n’en a pas moins été un rouage essentiel du dispositif d’Aimé Jacquet durant la Coupe du Monde 1998. Sa récompense ? Une place dans l’éternité aux côtés de ses 22 camarades, qui ont tous fait rêver la France et l’ont même unie au-delà de ce que l’on pouvait penser imaginable.
Christian Karembeu évoque la diversité en France
Interrogé par « Le Temps », l’ancien milieu de terrain a évoqué la puissance de l’aventure France 1998, et de cette fameuse étiquette « black-blanc-beur » :
Cette équipe a gravé dans le marbre l’identité multiculturelle de la France. La France black-blanc-beur, ce n’était pas notre équipe, c’était le pays. Nous lui avons donné un visage. Nous lui avons donné une fierté. Nous avons montré que la France dans toute sa diversité pouvait être une France qui gagne.
Cette équipe sacrée championne du monde, c’était porteur d’espoir. Tout le pays a fait la fête ensemble, c’était magnifique. Derrière, qu’est-ce qu’on remarque ? Un Noir aux Etats-Unis, c’est un Afro-Américain, qu’o renvoie à ses origines africaines. Un Noir en France, c’est un Français. Bon, c’est vrai, surtout quand il gagne… Ce n’est pas en une victoire qu’on change tout. Mais la nôtre a permis de rendre visible toutes les communautés. Pour moi, il y a une génération France 98 comme il y a eu une génération mai 68.
Une vingtaine d’années après, qu’en est-il ? Malheureusement, les divisions et le communautarisme semblent gagner du terrain sans cesse, ce que Karembeu déplore. Pourtant natif de Nouvelle-Calédonie, il ne souhaite pas tenir des propos négatifs à l’égard de la France, et appelle à aller de l’avant :
La France a commis des erreurs, mais il faut les replacer dans le contexte de l’époque coloniale. Et aujourd’hui, c’est à nous de réécrire l’histoire à la lumière de ce que l’on sait désormais. Il faut dépasser l’histoire telle qu’elle a été écrite par chaque roi pour que chaque individu puisse trouver sa place dans le monde.
Vous l’aurez compris : Karembeu souhaite davantage insister sur le besoin d’unité que sur les moindres polémiques pour diviser. D’ailleurs, interrogé sur l’épineux cas de Karim Benzema lorsque celui-ci était tricard en équipe de France, l’ancien Nantais n’a pas souhaité lié ce dossier à des tensions communauristes :
À mon avis c’est une erreur. Dans ce pays comme ailleurs, il y a un sélectionneur qui fait ses choix. Karim Benzema est un excellent joueur, mais il a été mêlé à des affaires qui ne l’ont pas servi… Je crois qu’il ne faut pas tomber dans le piège de voir du racisme dans chaque affaire. C’est contre-productif.
Partie intégrante d’une période d’unité et d’espoir pour l’ensemble du pays, Christian Karembeu souhaite que chacun fasse perdurer cet esprit positif qui s’était emparé du pays. Pour lui, toutes les petites polémiques ne doivent pas être prétexte à remuer le couteau dans la plaie de fractures du passé. Voilà qui est dit.