Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Buteur pour l’éternité lors de la finale remportée par l’équipe de France face au Brésil, Emmanuel Petit a d’autant plus savouré son but qu’il s’était laissé aller à une décision très risquée juste avant la rencontre. Un choix fait en solo, secrètement, et sans avertir ses coéquipiers. Osé, certes, mais finalement payant…
Maillon essentiel du système d’Aimé Jacquet, et d’ailleurs trop souvent sous-côté, Emmanuel Petit a connu son heure de gloire dans le temps additionnel de la finale de la Coupe du Monde 1998, en inscrivant l’ultime but synonyme de sacre assuré. Une délivrance pour l’homme à la queue de cheval, qui, il faut le dire, avait joué avec le feu quelques heures plus tôt…
Emmanuel Petit pas superstitieux avant la finale en 1998
À quelques heures de la finale, en effet, chacun se préparait comme il le pouvait du côté de Clairefontaine. Et dans cet effectif particulièrement superstitieux, et surtout soucieux de ne pas se porter l’oeil, Petit a pris un risque sans rien dire à ses coéquipiers. Il y a quelques années, il confiait ainsi :
C’était mon secret. J’avais caché un magnum de champagne dans une glacière et j’ai caché le tout derrière d’autres sacs. Deux autres personnes étaient dans la confidence : le cuisinier, qui m’avait dégoté le champagne, et Henri Emile. Les joueurs et le staff ne devaient surtout pas le savoir. Par superstition. Et si on avait perdu, je n’aurais jamais sorti cette caisse de la camionnette. C’est la seule qui est restée au fond jusqu’à ce que j’aille la chercher au coup de sifflet final.
Comme persuadé de la victoire des Bleus, l’ancien Monégasque ne s’était pas arrêté là, en ajoutant un autre subterfuge dans la fameuse camionnette :
La seule chose importante, c’était d’ajouter, dans la camionnette, un sac de sport. A l’intérieur, il y avait une trentaine de tee-shirts confectionnés pour être portés en cas de victoire. Dessus, il y avait le fameux slogan « La victoire est en nous ». Personne ne devait les voir et, si par malheur, la France avait perdu, j’avais pour mission de les détruire le plus vite possible.
Fort heureusement, le champagne et les t-shirts ont bel et bien pu être sortis après cette victoire, évitant une cruelle désillusion à Petit – qui a conservé sa surprise jusqu’au bout. L’anecdote témoigne en tout cas de cet effectif où chacun était certes au service du collectif avant tout, mais sans renier individuellement son caractère et son tempérament. Sur sa lancée, Petit avait d’ailleurs confié que le staff tolérait quelques largesses :
Durant le tournoi, il nous arrive régulièrement de refaire le monde le soir en nous bourrant la gueule avec une bonne bouteille de vin et Fabien Barthez… On remplit des cendriers entiers. Nous fumons aussi au bar. Le coach tolère ce petit travers pendant la Coupe du Monde.
Emmanuel Petit savait-il avant tout le monde que la France, qui n’avait encaissé que deux buts durant le tournoi, allait faire tomber le Brésil ? En tout cas, le milieu de terrain a pris le risque de défier le karma en préparant du champagne et des t-shirts à l’effigie de lui-même et de ses coéquipiers, tout cela avant d’affronter l’équipe la plus terrifiante du monde. Il fallait oser !