Par Joël Pütz | Journaliste sportif
Pionnier du basket français en NBA, converti à l’Islam à une époque où cela n’était pas forcément bien vu, Tariq Abdul-Wahad n’a jamais été du genre à se taire sur des causes socio-politiques. Il avait d’ailleurs tenu un discours particulièrement dur envers son pays d’origine il y a quelques années, à propos de son passé colonial.
Aujourd’hui, tout le monde connaît les noms de Tony Parker, Rudy Gobert ou encore Victor Wembanyama… mais rares sont ceux à se rappeler des premiers Français à avoir arpenté les parquets de la NBA. On retrouve parmi eux une légende comme Antoine Rigaudeau mais aussi et surtout Tariq Abdul-Wahad, qui sera à jamais connu comme le premier Tricolore à avoir foulé un terrain de la grande ligue américaine.
À bien des égards, l’ancien joueur du Magic et des Nuggets est un pionnier puisque né sous le nom d’Olivier Saint-Jean, il a choisi de le changer lors de sa conversion à l’Islam il y environ trente ans. Depuis sa retraite et alors qu’il a choisi de rester aux États-Unis plutôt que de rentrer en France, l’ailier suit d’un oeil critique l’évolution de son pays. En 2014, il n’avait d’ailleurs pas mâché ses mots lors d’une interview avec France Info :
Tariq Abdul-Wahad cash sur le passé colonial de la France
Je vais vous raconter une anecdote. J’ai pris la nationalité américaine. Je suis donc bi-national. Lorsque je suis arrivé à la cérémonie le jour J, nous étions environ 150. Une première personne est entrée dans la salle, et nous a expliqué ce qui allait se passer. Elle l’a fait en vietnamien. Ensuite une deuxième personne a traduit en espagnol. Et enfin une troisième personne nous a parlé en anglais. Car là où je vis, à San José, il y a une forte population hispanique et vietnamienne.
Tout ça pour dire que c’est facile d’être patriote aux Etats-Unis : ce pays nous accepte dès le début tel que nous sommes, et quelles que soient nos origines. Vous imaginez en France, une cérémonie qui se déroulerait en bambara ou en wolof ? Le système français a un vrai problème avec son immigration et son passé colonial. Et il faut accepter que certains Français, footballeurs ou non, soient binationaux. Et si Karim Benzema, ou un autre, refuse de chanter la Marseillaise, c’est son problème… et c’est son droit.
Alors que la thématique de l’immigration est aujourd’hui plus présente que jamais dans l’Hexagone, Abdul-Wahad ne se montrait donc guère tendre avec la France il y a une décennie. Pas sûr que cela ait changé depuis… Par ailleurs, il demeure toujours très attaché à sa Guyane natale, au point de faire quelques petites entorses à sa religion :
Je suis né dans l’Hexagone, mes parents sont repartis vivre là-bas. Cela fait très longtemps que je n’y suis pas retourné, depuis la Californie, ce n’est pas évident. Il faut soit passer par Miami et les Antilles, soit voyager via Paris. Mais je garde le lien, je suis en contact avec ma famille. Et ça passe par plein de petites choses : là par exemple, je vais rompre le jeûne avec des haricots rouges…
Si le traitement des minorités ethniques aux États-Unis a quelque peu souffert ces dernières années, Tariq Abdul-Wahad en tirait un bilan bien plus positif qu’en France en 2014. On aimerait bien connaître son avis sur le sujet de nos jours…