Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Comme seuls les grands joueurs en sont capables, Marcel Desailly a dominé à son poste dans trois pays majeurs durant sa carrière : la Division 1, la Serie A, et la Premier League. Avec du recul, celui qui a raccroché les crampons en 2006 est revenu sur ces périodes, en évoquant notamment la grosse différence entre l’Italie et l’Angleterre…
Si la Serie A n’a aujourd’hui aucun diffuseur en France après 2 mois de compétition, ce qu’on ne peut que déplorer, il fut un temps où ce championnat était unanimement reconnu comme le plus relevé d’Europe. C’est donc sans surprise qu’après avoir remporté la Ligue des Champions en 1993, Marcel Desailly a rejoint le grand Milan AC de Silvio Berlusconi. Une bascule dans une autre dimension pour le tricolore, qui a confié au « Guardian » :
Sur une échelle de 1 à 100, Marseille était à 40, et Milan à 100. C’est aussi simple que ça. L’organisation, le stade, 82.000 personnes dans le stade à chaque match, les infrastructures, la nourriture, les vêtements… C’était un monde différent. Sans oublier que mon salaire a été quadruplé par rapport à Marseille.
Bien loin de crouler face à la pression, d’autant que seuls 3 joueurs étrangers étaient alors autorisés sur la feuille de match en Italie, Desailly s’est très vite adapté :
J’adore la pression. Certains joueurs talentueux s’écroulent dans les grands stades. Moi, tout m’est venu naturellement dès le premier entraînement. Quelques années plus tard, Fabio Capello m’a dit : « Quand tu es arrivé, je ne savais pas vraiment qui tu étais, mais après une semaine d’entraînement, j’étais obligé de te faire jouer ». Ça m’a plu. C’est comme la jungle, seuls les plus costauds survivent.
Roi en Italie, Marcel Desailly a d’abord galéré en Angleterre
En 1998, le Franco-Ghanéen a quitté la Lombardie après y avoir tout gagné, et a rejoint Chelsea. Mais là où l’adaptation avait été rapide et fluide en Italie, les choses ont été bien différentes en Angleterre :
J’ai souffert, et mon égo en a pris un coup. Vraiment. Je me suis retrouvé contre des grands gaillards, des Dion Dublin, des Duncan Ferguson. Des mecs qui avaient la hargne en eux.
Tu te retrouves à jouer contre Coventry, Sunderland, des équipes qui envoyaient des grands ballons devant. Je n’arrivais pas à les intimider. En Italie ? Là-bas, j’étais un colosse. Je regardais les attaquants dans les yeux, je leur faisais comprendre : « Il n’y a rien pour toi aujourd’hui », et les mecs baissaient la tête. En Angleterre, non. Les mecs étaient prêts à se battre. J’ai été déprimé 4 mois.
Vous l’aurez compris : Desailly n’a jamais retrouvé le sentiment de puissance et de sérénité qui l’habitait lorsqu’il évoluait en Italie, dans ce qui constitue probablement les meilleures années de sa carrière. Sur les terrains comme en dehors, l’ami d’enfance de Didier Deschamps était comme un poisson dans l’eau – et même les cris de singe honteux dont il a été victime face à l’Udinese ne l’ont pas chamboulé. Un roc, fidèle à son surnom.
Malgré ses passages réussis à Marseille et Chelsea, et, de manière bien plus anecdotique, en Écosse et au Qatar pour finir sa carrière en pente douce, c’est bel et bien en Italie que Marcel Desailly a atteint sa plénitude. Capable de terrifier les joueurs adverses par un regard, le Français y a livré une véritable démonstration de force. À la hauteur de son talent.