Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Considéré par le plus grand nombre comme le meilleur gardien de but français de l’histoire, Fabien Barthez était avant tout un compétiteurs hors-pair. Et si les tensions entre le numéro 1 et le numéro 2 sont légion dans ce poste si particulier, Cédric Carrasso a une histoire bien singulière à raconter avec le « divin chauve ». Plongée 20 ans en arrière, dans la saison 2005-2006 de l’Olympique de Marseille.
Après des débuts en professionnels discrets dans la peau d’une doublure, Cédric Carrasso a eu la chance de sa vie à l’automne 2005. Suspendu pour avoir craché sur un arbitre, Fabien Barthez a en effet dû laisser sa place au jeune gardien de but, qui a signé de belles performances pour l’OM. Mais quand le champion du monde 1998 est revenu, tout a changé. Et de manière radicale.
Cédric Carrasso raconte la leçon glaciale de Fabien Barthez
Dans un entretien accordé à Oh My Goal, Carrasso a raconté que les relations étaient tendues avec son illustre aîné :
Comment on vit le retour de Barthez ? Il te met à l’heure direct le mec ! Moi j’ai envie de continuer de jouer, je m’éclate, on a une super équipe… Sauf que lui, il vient te voir, il te tape à l’épaule comme ça et il me dit : « Bon écoute petit, tu vas aller t’asseoir sur le banc maintenant ». Tu le regardes, tu te demandes s’il fait une blague, mais non le mec rigole pas.
Le mec reprend sa place et il le sait, car on en a parlé ensemble, il a été horrible avec moi. Dès qu’il avait mal quelque part, je m’échauffais tout au long du match et finalement il restait sur le terrain. Une autre fois en Coupe de France, il n’y avait pas grand monde au stade alors il dit qu’il ne peut pas jouer et j’ai dû le remplacer. Que des trucs comme ça.
Il était extrêmement dur avec moi, très exigeant. Je ne savais pas comment le prendre, c’était frustrant. J’étais à la fois admiratif, car il était gentil, mais en même temps, il était dur avec moi et je ne comprenais pas pourquoi. Je me demandais ce qu’il me voulait. Et c’est pour ça que je le respecterai toute ma vie, car c’est un grand, grand, grand Fabien Barthez.
En effet, « Fabulous Fab » n’avait pas décidé d’être méchant par plaisir ou par vice, mais bien pour formater son successeur et le préparer aux exigences du haut niveau. Car à la fin de la saison, Barthez a révélé sa main à Carrasso, qui se souvient, ému :
À Bordeaux, il m’appelle et me propose de venir boire un café. Il m’a parlé pendant 4 heures pour m’expliquer pourquoi il a été comme ça avec moi. Il jouait sa dernière saison pour aller au Mondial et se retrouve avec un gamin dans les pattes. Il me dit : « J’ai été obligé d’être comme ça avec toi parce que tu m’as obligé à aller un peu plus loin ».
Il me fait comprendre que c’est son dernier match et qu’après c’est à mon tour. Ça m’a marqué ! Je serai à jamais reconnaissant par rapport à Fabien. Il m’a tout fait comprendre en 5 minutes.
Si le mentorat « à la dure » se perd désormais dans la société et dans le monde du sport, Cédric Carrasso est resté très marqué par cette saison aux côtés de Fabien Barthez. Froid, distant et impitoyable pendant un an, la légende des Bleus a en fait contribué à façonner le succès de la carrière de son jeune second. Une belle histoire.