Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Légende vivante du sport français, Nikola Karabatic a contribué à porter très haut les couleurs de la France dans le monde du handball. Pourtant, le joueur d’origine serbo-croate a repéré une spécificité française qui le chiffonne quelque peu. Car pour lui, les autres pays ont un rapport bien différent à leurs équipes nationales. Explications.
Nikola Karabatic ne le cache pas : il est le produit de différentes cultures, lui le Croate par son père, Serbe par sa mère, et Français par son histoire. Cette diversité, « Kara » la porte en bandoulière, lui qui n’a jamais caché son amour pour la France, où il est arrivé à 4 ans. Néanmoins, sa manière de percevoir le rapport à son pays est plus proche de celle des Balkans, ou même de l’Allemagne, où il a joué 4 ans.
Dans un entretien accordé à Libération, Karabatic avait d’abord évoqué la place différente du sport dans les différents pays qu’il a fréquentés :
La culture sportive allemande est unique. Il y a un sentiment d’appartenance à son club et un amour de l’effort que je n’ai retrouvé nulle part ailleurs. Dans les Balkans, le sport est plutôt un mode de vie, une façon de considérer l’existence. Les enfants pratiquent des sports collectifs à l’école et en dehors, dans la rue, où ils se défient sans cesse. Le sport constitue un moteur primordial dans l’éducation.
En France, le sport a longtemps été un loisir mais on commence à se rapprocher de la culture sportive des Allemands, tout doucement. On arrive à force de résultats à ce que de nombreux sports aient leur place dans le patrimoine sportif hexagonal même si comme ailleurs, le foot est dominant.
Nikola Karabatic déplore le manque de patriotisme français
Plus largement, le frère de Luka Karabatic est sidéré par le fait que les équipes nationales française soient supportées d’un oeil plus distant, avec moins de fierté que par ailleurs. Il explique :
En France, dans le foot surtout, j’ai ressenti que certains supporteurs n’ont pas ce sentiment d’appartenance, de fierté nationale comme il y a dans les Balkans ou en Allemagne.
En Croatie, quand la sélection joue, tout le pays est en rouge et blanc, derrière son équipe. Pour eux, le sport est aussi un moyen de promouvoir leur pays sur le plan international alors que la France n’en a pas besoin. Il m’est arrivé de croiser des Français, plus dans le foot qu’ailleurs, qui ne supportaient pas leur équipe nationale. Un truc inenvisageable en Serbie, en Croatie ou en Allemagne. Je ne sais pas à quoi c’est dû.
Incrédule face à cette situation et face à ce qu’il entend parfois, Karabatic ne masque pas son incompréhension, lui qui n’est pourtant pas né dans l’Hexagone :
Je suis né en Serbie, d’une mère serbe et d’un père croate, j’ai grandi ici, et j’ai l’impression de me sentir plus Français que des gens qui sont là depuis des générations.
Les Français manquent-ils de patriotisme dans le soutien qu’ils donnent à leurs équipes nationales ? Nikola Karabatic le croit. Espérons néanmoins que les JO de Paris aient quelque peu fait changer d’avis au handballeur, qui, lui comme tous les autres athlètes français, a pu compter sur l’exceptionnelle ferveur du public durant la quinzaine.