Par Guillaume K. | Journaliste sportif
Usain Bolt est sans doute la plus grande légende de l’histoire du sprint, lui qui détient toujours le record du monde sur 100 et 200m. Et comme toutes les légendes, il existe beaucoup d’anecdotes dingues à son sujet. En voici une racontée par Wallace Spearmon.
Ceux qu’ont déjà eu la chance d’assister à des meetings d’athlétisme le savent, peu importe le niveau, il y a toujours une grande tension qui s’installe quand les sprinteurs entrent en piste. Avant les cris qui accompagnent ces forces de la nature dans leurs foulées, c’est un silence tout aussi assourdissant qui résonne dans le stade.
Si les fans le ressentent, la situation doit être encore plus insoutenable pour les athlètes qui n’attendent que le retentissement du pistolet pour courir après leur légende. Pour faire face à ce stress, deux catégories peuvent être distinguées : ceux qui restent de marbre et qui affichent une concentration dingue, et ceux qui s’amusent avec les caméras, les spectateurs ou leurs adversaires pour décompresser.
L’attitude dingue d’Usain Bolt dans sa jeunesse
Usain Bolt était clairement l’un de ces derniers, et ce depuis son plus jeune âge. Avant même de découvrir le niveau professionnel, il affichait une décontraction naturelle sur ses échauffements. C’est ce qu’a raconté l’Américain Wallace Spearmon, ancien sprinteur de niveau mondial devenu très bon ami avec la fusée de Jamaïque.
La première fois que j’ai couru contre Bolt, c’était à Londres. À l’échauffement, j’ai vu ce grand jamaïquain en train de jouer au loup avec des jeunes filles. Je me suis demandé si c’était bien lui qui était présenté comme le sprinteur qui allait me battre. Pour moi c’était impossible. Ce jour-là j’ai gagné, mais après, lors des championnats du monde, j’étais nerveux et c’est lui qui est venu s’amuser avec moi pour me détendre. J’avais 19 ans il en avait 16.
On a toujours été sur la même longueur d’onde. En 2004 je me souviens d’une course à New York, il a couru le 200m. Sur les 40 derniers mètres il a commencé à se tourner vers le public, à faire le show. Il y a une grosse communauté jamaïquaine à New York. Il s’est jeté dans la foule à l’arrivée, je n’avais jamais vu ça. J’ai compris que les gens adoraient ça et que c’était divertissant. J’ai compris qui il était. C’est drôle, jusqu’au moment où il te le fait à toi dans une course.
Usain Bolt ne jouait pas un rôle sur la piste, il laissait simplement briller sa personnalité. Il était du genre à jouer au loup avec des jeunes bénévoles à l’échauffement, à s’amuser avec la caméra lors de sa présentation, mais il ne perdait jamais la victoire de vue. C’était frustrant pour ses adversaires, mais divertissants pour ses millions de fans.
Il faut un mental d’acier pour devenir une star du sprint, et encore plus à l’époque d’Usain Bolt. Le Jamaïquain était capable de s’amuser tout l’échauffement puis de dépasser ses concurrents en célébrant avec les fans sur les derniers mètres. Un monstre sacré.