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Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Chanteur parmi les plus appréciés des Français, et véritable monstre de longévité, Serge Lama a récemment annoncé sa retraite. Un choix motivé par l’envie de ne pas faire les concerts de trop, mais aussi par un déphasage vis-à-vis de l’état de la chanson française, et plus largement de la culture française. Le chanteur n’a d’ailleurs pas mâché ses mots.
Désireux de ne pas se produire sur scène dans des états incompatibles avec ce qu’il estime devoir au public, Serge Lama a choisi de raccrocher le micro. À plus de 80 ans, et après d’innombrables chansons et des dizaines de tubes, l’interprète de « Je suis malade » estime avoir fait son temps. Tout cela ne l’empêche pas de garder un oeil critique sur la France, ses chansons et ses artistes. Et le Bordelais n’aime pas ce qu’il voit.
Serge Lama pas tendre avec l’état de la culture française
Invité de Pascal Praud sur Europe 1 tout récemment, Serge Lama s’est montré incisif vis-à-vis des artistes actuels :
Pour l’instant, la chanson française n’existe quasiment plus. Le texte n’existe plus. Les auteurs de chansons, maintenant, ils font une phrase, et après c’est n’importe quoi, pas grave ! Du moment que la musique va à peu près, ça fait le coup.
Des propos qui viennent corroborer ceux qu’il avait déjà tenus il y a un an dans les colonnes du Figaro :
La chanson vit des temps moroses depuis quelques années. Il y a du communautarisme culturel : chacun est dans son couloir. Je remarque aussi que l’on perd les mots. La culture française est en train de disparaître. On voit arriver des auteurs qui ne connaissent plus les mots et leur pouvoir qu’ils ont sur l’imagination ou sur le bonheur.
Pour ne rien arranger, Lama estime que le contexte actuel en France rend la création plus difficile :
Cela ne me paraît pas facile de créer aujourd’hui. On ne peut plus rien dire. Il existe un climat anxiogène car quand on dit des choses, on est attaqué par 25 associations. On ne dit plus des évidences, on fait du ni-ni. Ce n’est pas dans ma nature de rentrer là-dedans. On ne peut pas freiner la plume à chaque virgule par peur de choquer.
En somme, l’artiste se sent trop loin de l’époque actuelle, et rappelle que sa recette s’appuyait à la fois sur ses textes et sa présence sur scène. Deux notions trop galvaudées à ses yeux aujourd’hui :
Ce dont on discutait dans les salons, c’était la qualité des textes qui n’était pas ce qu’on attendait. J’étais un chanteur de scène, j’écrivais pour interpréter ces chansons devant le public. La scène est un combat. Je menais ce combat 300 dates par an. Il fallait que mes chansons tiennent la route, c’est la bonne expression.
La scène c’est le plus important pour un artiste. C’est un moyen de s’exprimer et de réinterpréter des chansons que le public connaît par cœur. Sur scène, je me détachais des chansons de l’album. Tous les soirs il y avait une âme différente et il faut chanter en fonction de cette âme.
La culture française est-elle en décrépitude ? Serge Lama semble le croire, et il ne se gêne pas pour le dire. C’est donc le sentiment du devoir accompli, et sans grande envie de prendre part à la scène musicale actuelle, que l’artiste aux centaines de chansons se retire. Avec une contribution impressionnante à son art.
