Que vous disputiez votre premier match en NBA, ou que vous comptiez déjà une quinzaine de saisons dans la ligue, Larry Bird n’avait aucune pitié. Traumatisée par la légende des Celtics durant son année rookie, une ancienne gloire avait mis sur pied une méthode atypique pour obtenir vengeance.
Prospect star du circuit lycéen, Shawn Kemp ne rencontre pas le succès escompté en NCAA. Recruté par Kentucky, l’intérieur ultra-athlétique se voit rapidement puni par sa fac pour raisons disciplinaires. Quelques mois plus tard, suite à une saison blanche, il rejoint malgré tout la NBA en tant que 17ème choix de la Draft 1989.
De quoi illustrer le niveau qu’il affichait déjà dans sa Concord High School, et la confiance que lui témoignaient les Sonics pour qu’il devienne une star. Mais ce processus demande du temps, même pour un joueur aussi « NBA ready » que Kemp. Il implique également des leçons reçues par les icônes de la ligue, l’une des spécialités d’un certain Larry Bird.
La première rencontre entre les deux hommes remonte au 13 décembre 1989, au Garden de Boston. À l’époque, le rookie avait hâte de retrouver le meilleur joueur de l’histoire issu de l’Indiana, son état natal. Il a pourtant rapidement déchanté face à la confiance de Larry Legend, comme il le retrace dans une récente interview pour Basketball Time Machine.
J’étais ce jeune gamin qui sortait de l’Indiana et qui essayait d’en être le nouveau représentant, et lui a fait exactement ce qu’il était censé faire. Il m’a trash-talké comme un fou. Il m’a dit exactement ce qu’il allait faire avant que le match ne commence. On est allés sur le parquet, et il a fait tout ce qu’il avait dit. Une vraie introduction en NBA.
Car Bird ne s’est pas contenté d’un trash-talking banal pour lui, mais a assuré tout cela en plantant… 40 points sur la tête de Kemp. Le tout avec 11 rebonds et 10 passes, histoire d’humilier un peu plus son adversaire avec un triple-double sensationnel.
À l’époque, on prenait les choses plutôt sérieusement. Quand un gars plantait autant de points sur vous, vous le preniez personnellement et essayiez de faire quelque chose pour effacer ça. Dans les années 1990, la NBA était une ligue plus axée sur la défense. Les gars qui étaient de bons défenseurs obtenaient énormément de respect.
Après une défense aussi laxiste face à Bird, Shawn Kemp avait donc à cœur de laver l’affront lors de leurs retrouvailles. Il a pour cela attendu sa saison sophomore, celle de la révélation pour lui. Histoire de ne pas oublier qu’il avait un compte à régler, le Reign Man avait trouvé une technique plutôt… particulière.
Ça m’avait tellement fait du mal que j’avais imprimé une photo de lui et l’avais affichée dans ma baignoire. Et chaque matin, je me levais juste pour la regarder. L’année suivante, on a joué contre Larry Bird et les Celtics, et j’ai dit à l’équipe : « Je vais lui rendre ce qu’il m’a donné dans cette salle. » Donc je ne comptais même pas tenter un tir en suspension. Tout ce que je voulais faire, c’était dunker !
On devine donc qu’il fait ici référence au match du 3 décembre 1990 entre les deux équipes. Les Sonics avaient alors reçu une grosse correction à l’extérieur avec une défaite de 33 points (102-135). Kemp, de son côté, avait en partie réussi son pari, en limitant Bird à 11 petits points (4/7 au tir), et en compilant quant à lui 19 points et 5 rebonds en sortie de banc.
Quand on parle de joueurs capables de pénétrer dans l’esprit de leurs adversaires, on ne peut pas éviter Larry Bird. Demandez plutôt à Shawn Kemp, qui en a fait des cauchemars pendant plusieurs mois.