Quelques jours seulement après un All-Star Game bien plus attractif et compétitif que les années précédentes (si l’on omet la prestation de Fergie…), une nouvelle bombe tombe sur la NBA, bien différente de celles que nous fans, apprécions. Sports Illustrated, au fil d’un long papier exclusif, révèle ainsi une culture des Dallas Mavericks qui fut, selon l’article et les témoignages, infestée de harcèlements sexuels et autres violences durant des années. La NBA, toujours dans l’objectif d’être avant-gardiste sur les résolutions de problèmes sociaux s’est donc rapidement exprimée, en annonçant qu’une enquête plus poussée serait effectuée et des décisions prises.
The NBA announced the Dallas Mavericks’ allegations in SI story “runs counter to the steadfast commitment of the NBA … completely unacceptable” and league plans to “closely monitor” team’s independent investigation.
— Shams Charania (@ShamsCharania) February 21, 2018
Une heure avant le tip-off de la saison régulière 2010-2011, une récente employée du staff des Mavericks dînait dans la pièce réservée aux médias. Une fois assise, le président de la franchise et CEO de l’époque, Terdema Ussery, lui demanda s’il pouvait se joindre à elle. La jeune femme devint nerveuse, non pas parce qu’elle s’apprêtait à dîner avec le boss de son boss ou parce qu’il était une des figures les plus influentes de Dallas, mais uniquement à cause de sa réputation de harceleur sexuel.
Lors de ce repas, l’employée se rappelle de l’échange débutant par Ussery lui demandant ce qu’elle allait faire du weekend. Confuse, elle demanda ce que le CEO entendait par là:
« Tu vas te faire gangbang, pas vrai? »
« Non, » répondit la jeune femme complètement prise de court. « Je vais voir un film avec des amis. »
« Non, » insista Ussery. « Tu vas te faire gangbang »
Choquée mais pas surprise, la récente membre du staff fut, selon elle, prévenue lorsqu’elle accepta le job: « Attention au président », « Quoi que tu fasses, ne te retrouve pas coincée dans l’ascenseur avec lui… »
Une fois cet échange passé, elle en aurait discuté avec des collègues féminines qui, loin d’être étonnées, racontèrent à leur tour d’autres anecdotes de harcèlement le concernant, allant de la demande au mariage jusqu’aux contacts physiques indésirés.
Une autre femme ayant refusée de donner plus de détails sur la situation avoua cependant que le CEO fut la raison pour laquelle elle démissionna après plus de 10 ans d’emploi.
« C’était vraiment une animalerie et je dis « c’était » uniquement car je n’y travaille plus. Je suis sûre que c’est encore le cas. »
Cependant, l’ancien président ne semble pas du tout être le seul à être impliqué. Les interviews de Sports Illustrated durant des mois dépeignent une culture emplie de misogynie, de comportements de prédateurs sexuels et même de violence domestiques. Non réponse et non soutien des supérieurs, un membre reconnu de l’organisation se permettant des violences et même un employée regardant des vidéos à caractères pornographiques à son bureau. Les sources ont bien évidemment décidé de rester anonyme par peur de représailles.
Bien que considéré comme « culture du vestiaire » (locker-room culture), le vestiaire de Dallas était en réalité une sorte de refuge selon une ancienne membre du staff. Selon elle, côtoyer les joueurs en permanence n’avait jamais mené à un seul problème car elle était traitée avec respect. Ce n’est qu’une fois retournée à son bureau que son anxiété reprenait.
« L’habit ne fait pas le moine » comme on dit, et il serait difficile de trouver un profil plus brillant que celui de Terdema. Diplômé de Princeton, il obtint un master à Harvard et un diplôme de droit à Berkeley. Il fut nommé commissionnaire de la CBA à uniquement 32 ans. Une fois devenu CEO en 1993, son nom était même couramment cité pour remplacer David Stern en tant que grand manitou de la NBA.
Ses collègues disaient de lui qu’il était un génie étant capable de convaincre avec des convictions divines mais aussi qu’il transgressait régulièrement les règles quand bon lui semblait. En 1998 suite à une enquête de Dallas après plusieurs accusations de harcèlement de sa part, une refonte du staff fut effectuée avec notamment une nouvelle ligne de conduite concernant ce problème et Buddy Pittman, nouveau directeur des ressources humaines.
« Cela a été discuté et géré. Je ne tiens pas à en discuter davantage car notre objectif est de construire une bonne organisation » furent les mots de Dominique Strau.. de Tessera à l’époque.
Evidemment, cette enquête n’a pas freiné la carrière du CEO le moins du monde, et il fut prolongé pour 3 ans l’année suivante. Il conserva même son poste quand Mark Cuban racheta la franchise en 2000.
Les témoignages s’enchaînent et s’accumulent avec toujours plus de détails mais Ussery décida ce mardi de nier en bloc :
« Je suis profondément déçu que des sources anonymes m’accusent de manière purement et simplement mensongères. Durant ma carrière avec les Dallas Mavericks, j’ai toujours visé un comportement impliquant intégrité et empathie pour les autres“
« Durant mes 20 ans au sein des Mavericks, je n’ai jamais été au courant de plaintes de harcèlements sexuels à propos de moi ou aucun des membres de l’organisation qui aurait eu ce genre de comportement déplacés »
A propos de Mark Cuban, avait-il un rôle au sein de tout cela ? Était-il au courant ? Il est difficile d’imaginer que le grand gourou à la langue pendue ait pu ignorer de telles plaintes qui pourrissaient la franchise de l’intérieur pendant plus d’une vingtaine d’années. Le même qui se vantait d’être différent des autres propriétaires car « il est si proche de tout qu’on ne peut pas le duper » ?
Selon des sources, Cuban ne fut jamais l’initiateur de ce genre de comportement mais « évidemment qu’il savait, tout le monde savait mais il fermait les yeux tant que les revenus étaient conséquents »
La première réponse de Cuban après avoir été contacté par Sports Illustrated fut récoltée lundi :
« Tout ceci est nouveau pour moi. J’ai seulement été mis au courant parce que j’ai entendu que vous étiez en train d’enquêter […] Avec ce que j’ai lu, nous avons licencié notre DRH (Pittman, ndlr). J’ai zéro tolérance pour ce que j’ai lu. »
Le propriétaire commence donc juste à gérer la polémique autour de sa franchise. Il a aussi mis en place une hotline de conseil/soutien et a instauré des séminaires obligatoires (pour lui compris) sur les sujets en question.
« Je veux régler ce problème… Il y a évidemment un problème dans l’organisation des Mavericks et nous devons le régler. C’est tout. Nous effectuerons toutes les étapes. Ce n’est pas quelque chose que nous acceptons. Je refuse. C’est inacceptable. Je suis embarrassé que ca soit arrivé sous mon nez pour être honnête et ça doit être réglé. Point barre. »
Triste affaire à suivre dans les prochains jours…