Après un été éprouvant, Anthony Racine est de retour aux affaires à Chartres. Pour Parlons Basket, il fait le point sur cette année mouvementée, sur son actualité, et sur ses ambitions futures.
Parlons Basket : Salut Anthony. La première question qu’on aimerait te poser, c’est comment ça va après la période récente ?
Anthony Racine : Ca va très bien, content d’avoir pu trouver un club. Ca se passe très bien à Chartres. Ce qui est bien, c’est que c’est une ville proche de Paris, et de Fontainebleau, d’où je viens et où ma famille habite. Du coup l’adaptation s’est faite très rapidement. Je connaissais aussi quelques coéquipiers et le coach, pour qui j’ai joué à Saint-Quentin.
PB : Il y a quelques mois tu étais encore à Orchies, où tu as fait 33 matchs pour une dizaine de points de moyenne. Après ça, ça a été le début d’un long été : on te propose une prolongation, que tu refuses. Pourquoi ?
A.R : Il n’y avait pas vraiment une offre concrète. C’était une possibilité, mais je ne pouvais pas m’avancer parce qu’il y avait aussi de l’incertitude au niveau du club. On ne savait pas si le club allait redémarrer en N1, et moi mon objectif était de remonter en Pro B le plus vite possible. Voilà pourquoi ça ne s’est pas fait.
PB : Le marché étant de plus en plus compliqué, tu n’as pas trouvé pas de club pendant un moment. Tu te retrouves au chômage à 23 ans. Comment expliques-tu cette situation ?
A.R : Il y a plusieurs choses. Je pense que c’est un tout. Déjà, il faut être là au bon moment et avoir un peu de chance dans une carrière, mais le système n’aide pas en ce moment, avec le quota d’étrangers qui augmentent. Du coup, beaucoup de joueurs français descendent d’un cran. C’est pas évident, et c’est pour ça qu’aujourd’hui avoir une place en Pro B vaut de l’or, ce qui n’était pas forcément le cas avant. Quand j’étais petit, que je regardais les matchs de mon père, il y avait deux étrangers et c’était plus ouvert. Maintenant, c’est beaucoup plus dur.
PB : A ton âge, comment tu gères une situation comme celle-ci ?
A.R : On ne va pas se mentir, ce n’est pas facile du tout. Malgré le fait que ce soit ma 6ème année en pro, il y a encore des choses sur lesquelles je n’ai pas d’expérience, comme ce qui m’est arrivé cet été. Ca a été très dur mentalement, physiquement, dans tous les domaines. Heureusement que j’avais ma famille, mes amis, et que j’ai fait des tournois à droite et à gauche pour me maintenir en forme. Mais quand le championnat a repris, ça a été très dur dans la tête.
PB : La question est peut-être forte, mais as-tu pensé à abandonner ta carrière à un moment donné ? As-tu eu des remises en question ?
A.R : J’ai eu des remises en question oui, par rapport à moi, à ce que je dégageais comme image, et par rapport à ce que je faisais sur le terrain. Après, certes ton égo en prend un coup, mais non je n’ai jamais pensé à arrêter, parce que j’aime le basket et cela depuis tout petit. On pense par contre à reprendre quelque chose à côté, pour avoir un minimum de sécurité, mais ça s’arrête là.
PB : Tu as mentionné ta famille, qui est une famille de basket. Quel a été son rôle durant cette période ?
A.R : Ma famille m’a beaucoup aidé psychologiquement, en me parlant beaucoup, en prenant des nouvelles… C’est vrai que la situation était compliquée, et avoir une famille dans le milieu, et donc qui me comprend, a facilité les choses.
PB : Tu t’es beaucoup préparé cet été pour rester au niveau. C’était de ton côté, ou avec certaines équipes ?
A.R : Je me suis entrainé avec certaines équipes au mois d’août, mais tout le mois de juin et de juillet, je me suis entrainé individuellement, j’ai joué, fait des tournois… Malgré les inconvénients d’être au chômage, il y a des avantages comme pouvoir travailler beaucoup plus longtemps et de manière beaucoup plus intense.
PB : Après cet été, tu as finalement signé à Chartres il y a environ un mois. Qu’est-ce qui a fait que tu es arrivé là-bas ?
A.R : Plusieurs de mes amis étaient dans l’équipe, comme Olivier Romain ou Harry Disy, et je connaissais le coach pour l’avoir eu à Saint-Quentin, donc ça s’est fait rapidement. Le club n’était pas très satisfait de l’américain Justin Black, et comme moi je m’entrainais avec eux depuis une ou deux semaines, ils m’ont proposé de faire parti de l’aventure avec eux.
PB : Tu parles justement de Justin Black, que tu viens remplacer et qui est un joueur américain. Est-ce que ça n’est pas une petite revanche sur ta mésaventure de cet été ?
A.R : C’est pas vraiment une revanche mais plutôt un challenge pour moi. Je me dis que je remplace un Américain, et que je dois donc faire pareil ou mieux qu’un Américain. Je ne remets pas en cause le système, on sait tous qu’il est dur pour plein de raisons, mais moi je me concentre sur ce que j’ai à faire. Je remplace un Américain, je dois donc faire pareil voire mieux.
PB : En 6 matchs depuis ton arrivée, tu fais mieux statistiquement : 11 points par match en moins de 20 minutes. Comment juges-tu ton début de saison ?
A.R : Je me sens très bien. Bien sûr, je travaille et j’aspire à avoir plus à un moment donné. Mais je me contente de ce que j’ai pour l’instant. Le fait de ne pas avoir de club cet été m’a fait me rendre compte à quel point le basket et la compétition peuvent manquer, donc même quand on te donne 10, 15, 20 minutes, tu les prends. Ce plaisir-là fait que je me sens bien et en confiance en ce début de saison.
PB : Collectivement, vous en êtes à 6 victoires pour 2 défaites. Vous avez parlé d’objectifs pour la saison ?
A.R : L’objectif est clairement le top 5. On se l’est tous dit, c’est là où on aspire à être. Ce n’est que e début de saison, mais pour l’instant on y est et on prend les matchs un par un.
PB : A titre personnel, t’es-tu fixé des objectifs ?
A.R : Oui, bien sûr. J’ai envie de tirer mon épingle du jeu dans une équipe gagne, et y faire de bonnes choses. C’est là que les coachs ou les gens importants le remarquent. Comme je l’ai dit, mon but est de remonter le plus vite possible en Pro B. J’ai 23 ans et j’ai ma carrière devant moi. S’il faut refaire des saisons en N1, j’en ferai, et si je peux aller plus haut, j’irai. J’ai juste envie d’être sur le terrain et de jouer au basket tout en me respectant.
PB : La route est encore longue, on t’imagine tourné vers le futur. Ton passage au chômage est un lointain souvenir maintenant ?
A.R : Non, je l’ai tous les jours en tête. C’est pour ça que je ne m’autorise pas à m’endormir sur le terrain ou à me dire « je suis fatigué » quelque jour que ce soit. Je sais que cet épisode peut se reproduire. T’as beau faire une bonne saison en N1, en Pro B ou même au dessus, tu n’es pas assuré de retrouver un club derrière, et les exemples comme celui de Mike Gelabale ou Seidou Njoya ne manquent pas. Beaucoup d’exemple et ça fait peur.
PB : Beaucoup de joueurs que tu as côtoyé lors du Camp SNB ?
Exactement, des joueurs côtoyés lors du Camp SNB, ou bien pour la Summer League de Cergy. D’ailleurs je fais une petite dédicace à tous mes amis qui ont organisé ça à Cergy. Beaucoup de bons joueurs se retrouvent sans club, et il faut tirer la sonnette d’alarme.
PB : Finalement, qu’est-ce que tu retiens de cet été ?
A.R : Honnêtement, sur le coup, tu as l’impression que tout va mal. Le basket c’est ma passion et aussi mon métier, ce qui me permet de manger et de gagner ma vie. Quand tu ne peux pas faire mon métier, tu as l’impression que tout autour de toi ne va pas. Et en prenant du recul aujourd’hui, c’est une situation qui m’a vraiment endurci, et ça se voit sur le terrain, parce que j’ai faim de basket. C’est un sentiment qu’il faut garder en permanence, car c’est ce qui permet de se donner tous les jours à fond. Ca a aussi été une réflexion pour moi-même : « Pourquoi est-ce que tu te retrouves au chômage Anthony ? » Ca n’est pas que de la faute du système, des joueurs étrangers etc… Beaucoup de choses passent par la tête. Et ça m’a endurci.
PB : Merci d’avoir pris le temps de nous répondre. On te souhaite une bonne saison à Chartres et de la réussite dans la poursuite de tes objectifs.
A.R : Merci à vous, à bientôt.
Toute l’équipe remercie Anthony Racine d’avoir pris le temps de répondre à nos questions.
(Interview réalisée le lundi 06 novembre 2017 par téléphone)