22 juin 2017 à New York. Derrick White est officiellement un joueur NBA. Sélectionné par San Antonio en 29ème position, il va rejoindre l’une des franchises les plus respectées de la ligue. Pourtant, à l’image de son futur coéquipier Jonathon Simmons, rien n’a été facile pour lui.
Derrick White n’est pas de ceux prédisposés à la réussite et à la lumière. Né à Parker dans le Colorado, comme un clin d’oeil au légendaire numéro 9 de sa nouvelle franchise, ce meneur-arrière a bien failli tout arrêter après l’obtention de son bac en 2012. La raison ? Aucune université ne s’intéressait à lui. Si le rookie de 23 ans est aujourd’hui un beau bébé (1m96 pour 90 kilos), il a longtemps été handicapé par un physique défaillant, la faute à une croissance retardataire qui n’a pas voulu s’adapter à son amour pour le jeu. Cela lui a valu l’ignorance totale des universités, qui lui ont tour à tour répété qu’il n’arriverait jamais à rien à cause de son physique. Même la Division 2 n’en voulait pas.
Lors de cet été 2012, seules deux propositions semblent s’offrir à lui. La première : intégrer l’université Johnson & Wales de Denver, la seule qui croyait en lui, et notamment son coach Jeff Culver. La seconde : arrêter le basket. Inenvisageable pour lui. « J’aimais tellement le basket, je voulais continuer, je ne voulais pas que ça s’arrête », explique-t-il aujourd’hui. Mais comme toujours avec lui, rien n’est simple. En effet, l’université de Denver est davantage spécialisée dans les formations culinaires que dans le sport, et aller là-bas peut s’apparenter à un suicide sportif. Alors il patiente, et est finalement sauvé par un coup de pouce du destin. Jeff Culver, le seul coach qui le voulait, s’assoit sur le banc de Colorado Springs en 2ème divison NCAA. Il transmet une offre à Derrick White en lui expliquant son projet. Culver sait que le père de son protégé a eu une croissance tardive et qu’il y a de bonnes chances que cela se reproduise. Il est clair avec lui, il entend n’en faire un titulaire qu’à la fin de son passage en université.
Mais Derrick White n’est pas homme à se soumettre au fatalisme. Dès les premiers entrainements, il impressionne, et son corps évolue enfin au rythme escompté. Jeff Culver n’a pas le choix : le jeune joueur intègre le cinq. Il ne le quittera que 3 années après, le temps pour lui d’être devenu le meilleur marqueur et passeur de l’histoire des Mountain Lions. En 2015, derrière ses 26 points, 7 rebonds et 5 passes, son équipe se qualifie même pour le tournoi NCAA, et il est nommé All-American. Lors de son avant-dernier match, il score 50 points, capte 14 rebonds et distribue 8 caviars. La Division II ne le retiendra pas plus longtemps, et il choisit de monter d’un échelon et de rejoindre les Colorado Buffaloes en Division 1. Après n’avoir pas joué de la saison 2015-2016 comme l’exige le règlement NCAA, il se fait sa place dans le roster pour l’exercice 2016-2017 et dispute la Pac-12 Conference, où se trouvent notamment Lonzo Ball et Markelle Fultz. Il y tourne à 18 points, 4 rebonds et 4 passes, est nommé All-Pac-12 First Team et All-Defensive Team. Le temps de penser à la NBA est venu.
Quand il se présente au workout pré-draft, il est l’un des rares à n’avoir jamais figuré dans les listes des meilleurs espoirs de lycée. Il est surtout le seul qui va utiliser une partie de son contrat NBA pour rembourser un prêt étudiant, qu’il avait été obligé de contracter pour sa première année d’université. Très vite, les Spurs sont intéressés par son profil et se renseignent. Son coach aux Buffaloes Tad Boyle ne leur en dit que du bien :
« Il faisait tout pour nous. C’était notre meilleur shooter, notre joueur le plus à l’aise avec la balle, notre meilleur défenseur, notre meilleur à la prise de décision. Il faisait tout »
Le General Manager des Spurs R.C Buford connait bien Boyle. Il lui fait confiance. On lui explique que White n’est ni un meneur ni un arrière, mais plutôt un mélange des deux, et qu’il fait beaucoup de choses bien. Les Spurs creusent la piste. Ils découvrent un joueur appliqué, battant, intelligent et adroit – l’un des rares à se présenter à la draft qui tourne à 50-40-80% au shoot, lancer franc et tir extérieur. Surtout, et San Antonio l’apprécie mieux que personne, le garçon est humble. Tad Boyle confirme :
« Le mieux avec Derrick c’est que ce n’est pas l’un de ces gamins qui ont été adulés depuis leur plus jeune âge. Tout ce qu’il a, il a du se battre pour l’avoir »
Et ce qu’il a obtenu, c’est une place en NBA à San Antonio. Certains continuent à le critiquer, à lui prédire l’échec, mais après tant d’années à donner tort à ses détracteurs, il ne s’en soucie plus. White est surtout impatient de se jeter dans le grand bain. « J’adore le style de jeu ici, ça me correspond bien. J’ai hâte d’y être ».
Une bien belle histoire qu’il nous tarde de voir se poursuivre sous les ordres de Gregg Popovich. Derrick White aura fort à faire. Peu lui importe. Il a réalisé son rêvé.